La journée du 8 mars a fait des droits des femmes une cause internationale. Et si nous aussi, au Projet Voltaire, mettions le féminin à l’honneur ? Commençons par quelques adjectifs courants qui sont cause de nombreuses erreurs dès qu’il s’agit de changer leur genre. Faut-il ajouter un « e » final ou peut-on s’en passer ? Doit-on aller jusqu’à modifier leur terminaison ? Voici de quoi apaiser vos hésitations !
bénit —> bénite
Le verbe bénir a deux participes passés et adjectifs : béni et bénit, qui, au féminin, donnent bénie et bénite. Comment choisir entre les deux ? Avec un « t », bénit(e) se dit de certaines choses (pain, eau), qui ont reçu la bénédiction d’un prêtre. L’adjectif est tiré du latin benedictum, qui a donné « benoît ». On écrit donc : pain bénit, eau bénite. Dans tous les autres cas, même s’il s’agit de la bénédiction de Dieu, c’est béni(e) qui convient. Exemples : un enfant béni, un jour béni, une maison bénie…
Astuces pour distinguer les deux formes :
« L’eau bénite, c’est un rite ! » ;
Le « t » final de bénit est contenu dans le nom prêtre.
enclin –> encline
Cet adjectif aussi a son féminin ! Pourquoi y échapperait-il, alors que « coquin » fait bien « coquine » ? Enclin signifie « porté naturellement à quelque chose, prédisposé à quelque chose ». Une personne peut donc être encline au bien, au mal, à la paresse, aux mathématiques… Étymologiquement, enclin est issu du verbe latin inclinare qui a donné « incliner ». En fait, incliné et enclin sont des doublets lexicaux. Le premier a gardé un sens propre, le second a pris un sens figuré.
inclus –> incluse
L’adjectif inclus se termine par un « s » final, hérité du participe passé latin inclusus. On écrira donc, au féminin, « la surprise est incluse dans le paquet », « les charges sont incluses dans le loyer ». Si l’on est tenté d’écrire « inclue » ou « inclues », formes fautives, c’est sans doute parce que l’on pense à l’adjectif contraire exclu, lequel fait bien exclue au féminin ! Pourquoi n’a-t-il pas de « s », celui-là ? Parce qu’il est directement formé sur le verbe exclure, auquel on a ôté la terminaison.
malin –> maligne
Maligne, avec un « g », est le féminin traditionnel de malin. De même, bénin fait bénigne. D’où vient ce « g » ? Du latin malignus (méchant) et benignus (bienveillant). On parlera donc d’une fille maligne, d’une tumeur bénigne… Cependant, Larousse indique que la forme « maline » est de plus en plus courante à l’oral, au sens de « malicieuse, astucieuse ». Cela serait, d’après le dictionnaire, plus cohérent par rapport à des « couples » déjà existants, tel marin, marine. Quoi qu’il soit, on continuera d’employer maligne dans la langue soignée !
tabou –> taboue
Au masculin, on parle d’un mot tabou, de sujets tabous. Et au féminin ? D’une maladie taboue, d’une pratique taboue, de questions taboues… Rappelons que ce qui est « tabou » fait l’objet d’un tabou, c’est-à-dire d’une interdiction (religieuse à l’origine). Le mot a été emprunté à l’anglais taboo, qui est aussi le nom d’un célèbre jeu de société, lui-même issu du polynésien tabu, « sacré ».
Sandrine Campese
Merci beaucoup pour toutes vos publications ! À propos de l’eau bénite, doit-on dire « l’eau bénite par un prêtre » ou bien « l’eau bénie par un prêtre » ? En effet, cette eau bénite est bénie par un prêtre. Merci d’avance pour votre réponse.
Bien vu Robert de Grenoble 🙂
Merci très belle leçon. Bonne application instructive
Merci Lilou !
Merci beaucoup pour ces rappels
C’est un plaisir pour nous de vous être utiles :-).
Bonjour Sandrine,
Merci pour cet article et au passage pour vos dictées que j’adore faire sur papier pour ne pas être influencée par le « correcteur » automatique ?
J’ai consulté cet article quant à tabou au féminin pluriel.
J’ai lu que tabou est ou était un adjectif invariable et que l’accord en genre et en nombre est devenu toléré. Projet Voltaire est mon site de référence, pouvez vous me confirmer cela s’il vous plaît.
Bien cordialement,
Mélina
Bonsoir Mélina, merci pour votre message qui me fait très plaisir. C’est super que vous fassiez les dictées du dimanche matin ! Je suis certaine que vous évitez bon nombre de pièges :-). Concernant votre question, où avez-vous lu que « tabou » était invariable ? C’est bien un adjectif qui s’accorde en genre et en nombre… Bonne soirée.
SEMBLENT ! Pardon…
Je reviens !
Je pense que le contexte apporte l’éclairage nécessaire. Cette maison est bénie ; ceux qui l’habitent semble si heureux (Dieu doit les protéger…)/Cette maison est bénite (le curé du village est passé un jour la bénir…).
Bonne soirée (qu’elle soit bénie, pas forcément bénite :)) ! ).
Bonjour, Sandrine. Je ne comprends pas très bien la distinction entre béni et bénit. Ou plutôt je crois comprendre que bénit s’applique strictement à des choses (ou des personnes) dont on est certain qu’elles ont reçu concrètement la bénédiction d’un prêtre. Cependant, pour ce qui est des exemples donnés, est-ce qu’un enfant et une maison (on bénit bien des bateaux , et peut-être aussi des avions, etc.) ne peuvent pas avoir été bénis (tiens, là, au fait,dans la conjugaison, c’est toujours « i » !) par un prêtre ? (Un jour, peut-être pas, encore que…).
En un mot, cette règle, ou du moins son énonciation, me paraît personnellement un peu confuse… Amicalement.
Bonjour Sandrine et un grand merci pour ces éclairages. J’aurais aimé que soit évoqué l’adjectif « partisan » (je suis partisan de…), comment dire au féminin ?! Merci par avance de votre réponse.
Bonjour Geneviève, c’est toujours avec plaisir ! Vous avez raison, j’aurais pu ajouter à la liste l’adjectif partisan qui fait « partisane » au féminin, avec un seul « n ». Il pourrait être tentant, en effet, d’écrire « partisant’ avec un « t » et d’ajouter un « e » au féminin ! Bon après-midi.