Poursuivons notre série de l’été sur les homophones avec trois nouveaux couples de noms qui sont source d’hésitations. Peut-être nourrissez-vous le dessein de jouer au golf, la pratique du swing symbolisant, dans votre esprit, les prémices des vacances ? Dessein, golf et prémices, voici trois mots qui peuvent s’écrire d’une autre façon, avec un tout autre sens. Et si l’on vous présentait ces faux jumeaux ?
dessin et dessein
Avant, dessin et dessein, c’était blanc bonnet et bonnet blanc ! On les employait indifféremment au sens propre de « représentation graphique » et au sens figuré de « projet, but ».
Ce n’est qu’à la fin du XVIIIe siècle que dessein a pris son envol laissant à dessin le monopole… du crayon et du papier ! Néanmoins, le double sens a survécu dans la forme pronominale se dessiner – prendre tournure –, dans le verbe esquisser – « faire l’esquisse », mais aussi « jeter les bases de quelque chose » – et dans le nom motif, à la fois « sujet d’une œuvre » et « raison d’agir ».
Dessin et dessein sont dérivés d’un vieux verbe, desseigner, à l’origine d’un nom anglais très en vogue : design ! Retour à l’envoyeur : il a gagné notre vocabulaire dans les années 1950. Avec une étymologie aussi « frenchy », peut-on réellement le considérer comme un anglicisme ?
golf et golfe
Tordons le cou à une idée fantaisiste et volontiers sexiste : golf n’est pas l’acronyme de Gentlemen Only Ladies Forbidden (réservé aux hommes, interdit aux femmes). C’est un nom anglais, d’origine écossaise ou hollandaise, apparu dans notre vocabulaire à la fin du XIXe siècle, lorsque ce sport fut importé en France.
Il est donc bien distinct du golfe, de l’italien golfo, terme de géographie qui s’est généralisé grâce aux récits de voyage du XVIe siècle sur les golfes des Indes orientales ou des Indes occidentales, depuis rebaptisées « Amérique ». Avec une majuscule, le Golfe désigne le golfe persique ou arabique (ex. : la guerre du Golfe).
Green, club, swing, le vocabulaire du golf est essentiellement composé de mots anglais qui n’ont pas été traduits en français… sauf au Québec, où les équivalents proposés sont : « vert », « bâton » et « élan ».
prémices et prémisses
Généralement employés au pluriel, ces deux homophones n’ont pas la même origine. Le nom prémisses, du latin praemissa, désigne les propositions d’un syllogisme. Défini par le philosophe grec Aristote, le syllogisme est un raisonnement logique qui comprend deux propositions, appelées majeure et mineure, et une conclusion.
Prémices, du latin primus, « premier », s’est d’abord employé à propos des premiers fruits de la terre et des premiers-nés d’un troupeau destinés aux offrandes religieuses, avant de prendre le sens figuré de « commencement ».
Le syllogisme le plus connu est : Tous les hommes sont mortels (majeure), or Socrate est un homme (mineure), donc Socrate est mortel (conclusion).
Sandrine Campese
Votre article sur les auxiliaires et l’accord des participes passés est très clair. Merci beaucoup : je l’adopte pour le transmettre. Je pense que l’accord des participes passés des verbes pronominaux mériterait un article supplémentaire : « Elles se sont baignées ». »Les choses que je me suis dites ». Merci beaucoup.
Bonjour Guilaine et merci pour votre sympathique message. Les articles dont vous parlez existent, il suffit de cliquer sur les exemples qui sont en orange et en gras. Ce sont des liens qui vous emmènent vers un autre article. Bonne découverte et à bientôt !
Bonjour Sandrine,
Je vous remercie beaucoup des pépites que vous venez, régulièrement, partagées avec nous sur le site. Je voudrais vous poser une question qui sort de l’épure de votre contribution sur les homophones. Je voudrais s’il vous plait savoir s’il était possible d’utiliser l’expression » pierre de refend » à la place de » pierre angulaire » ? Peut-on par exemple dire : la laïcité est la pierre de refend de l’édifice républicain en France ? J’ai cherché sur Internet, mais je n’ai pas trouvé beaucoup d’exemples sur l’utilisation de cette expression hormis » mur de refend « .
Dans l’attente de vous lire, je vous adresse mes remerciements anticipés.
Cordialement,
Bonsoir Gaston et merci pour votre message plein de sympathie. Le Trésor de la langue française mentionne le syntagme « pierre de refend », mais au sens propre : « Pierre de refend. Pierre angulaire. Des hercules dédaigneux qui soutiennent une maison à six étages d’une seule épaule (…) ou de malheureuses sirènes dont la queue écaillée s’écrase affreusement entre les pierres de refend (Hugo, Rhin, 1842, p. 253). » Je pense que le sens figuré de « base, élément essentiel, fondamental » ne peut être exprimé que par l’expression « pierre angulaire ». Vous pouvez toujours poser la question sur notre forum https://www.question-orthographe.fr, on ne sait jamais… Bonne soirée et à bientôt !