Nous le savons, l’orthographe française n’a cessé de varier au fil du temps. Ce n’est qu’au XIXe siècle qu’ont été fixées les graphies des mots que nous connaissons aujourd’hui. Pour appréhender ces « allers-retours », voici cinq paires d’homonymes. Leur particularité ? Au moins l’un d’eux a emprunté, par le passé, l’orthographe de l’autre !
philtre & filtre
Jadis, le nom philtre s’écrivait « filtre », alors qu’il est issu du grec philtron, « moyen de se faire aimer ». Il désigne un breuvage propre à inspirer de l’amour. Quant au filtre, d’origine médiévale, il est d’abord apparu sous la graphie latine filtrum dans le vocabulaire des alchimistes, pour désigner le dispositif à travers lequel on fait passer un liquide afin de le débarrasser de ses impuretés.
Dans le même ordre d’idée, fantasme s’est d’abord écrit « phantasme », conformément à son origine grecque phantasma (apparition).
amende & amande
C’est le latin amandula qui a donné le nom amande, après un passage par le grec amugdalê (d’où vient « amygdale »). Pourtant, « amande » existait sous la forme « amende » jusqu’au XVIIe siècle ! De même, amende s’est écrit « amande » avant de prendre sa graphie définitive (du moins jusqu’à nouvel ordre !) au XIIIe siècle. Dérivé du verbe « amender » (emendare en latin), il désigne une peine pécuniaire.
exhausser & exaucer
Ces deux homonymes ont la même origine. Intéressons-nous d’abord à exhausser. Le préfixe ex- (en dehors) lui confère un sens encore plus fort que le verbe « hausser ». Exhausser, c’est donner plus de hauteur à ce qui a déjà une certaine hauteur ou encore élever une personne en dignité. De ce dernier sens est née la variante exaucer pour « satisfaire une demande ». Par la suite, « exhausser » n’a conservé que le sens de « rendre plus élevé ».
balade & ballade
Jusqu’au XVIe siècle, le nom féminin ballade – du provençal ballada, « chanson à danse, petit poème chanté » – s’écrivait « balade ». Comme les jongleurs et les mendiants chantaient de ville en ville, le verbe « (se) balader » a fini par signifier « marcher sans but, flâner ». Sur ce verbe s’est formé balade, au milieu du XIXe siècle, pour désigner la promenade dans le langage courant.
Quitte à faire une faute, il serait beaucoup plus logique d’écrire « balade » à la place de « ballade » – comme c’était le cas au Moyen Âge – que « ballade » à la place de « balade » !
repaire & repère
En ancien français, le repaire désignait le retour au pays et, par métonymie, la demeure, le logis. C’est au XIIe siècle qu’il devient le refuge des bêtes sauvages et, au figuré, celui de malfaiteurs, d’individus dangereux… À l’origine, repère est le doublet lexical de « repaire ». Comment est-on passé de l’un à l’autre ? Facile : de l’idée de retour à un certain point, on n’a conservé que le point ! C’est ainsi qu’est né l’homonyme « repère », marque servant à retrouver un élément, par exemple sur une carte (point de repère).
Sandrine Campese
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1 – Fratrie et phratrie.
– Fratrerie : ensemble de frères et sœurs d’une famille
– Phratrie : une tribu.
2 – Tribu et tribut.
– Tribu : une communauté d’ethnie.
– Tribut : impôt, taxe.
3 – Héros et Hérault, les exemples sont légion.
Bonsoir, les exemples d’homonymes sont légion, oui. Mais là il s’agit d’homonymes dont au moins l’un deux a emprunté, par le passé, l’orthographe de l’autre. Ce n’est pas tout à fait la même chose ;-). Bonne soirée.