La bande dessinée Astérix et Obélix perpétue la tradition instaurée par Goscinny et Uderzo, en attribuant aux personnages des noms éloquents et dans l’air du temps. Jugez plutôt : l’éditeur romain Promoplus et son majordome Kefélapolis, les Gaulois Rézowifix, « connecté » aux nouvelles, et Doublepolémix, colporteur sans frontières… L’occasion de revenir aux sources et de nous interroger sur l’origine et le sens des patronymes de nos deux héros moustachus : Astérix et Obélix.
« Astérix » est dérivé d’astérisque
Signifiant « petite étoile » (asteriskos en grec, de astêr, « étoile »), l’astérisque est représenté par le symbole *. Placé à la suite d’un mot, il renvoie à une note de bas de page ; placé devant un mot, il en signale une forme particulière.
Remplacez la terminaison –isque par –ix, en référence au chef gaulois Vercingétorix, et vous obtenez « Astérix ». Mais ce nom a également un sens caché ! Nous l’avons vu, le grec astêr signifie « étoile ». Quant au mot celte rix, il se traduit par « roi ». Littéralement, Astérix est le « roi des étoiles ». Un nom prédestiné pour une star de bande dessinée !
Ce que les créateurs n’avaient pas prévu, en baptisant ainsi leur personnage principal, c’est que ce nom deviendrait populaire au point d’éclipser celui dont il était issu : l’astérisque.
Difficile, quand on a appris le patronyme du guerrier gaulois avant même de soupçonner l’existence du signe typographique, de ne pas s’emmêler les pinceaux une fois arrivé à l’âge adulte. De plus, si l’on se prive de bien articuler le mot « astérisque », on bascule inévitablement vers « astérix ».
Et Obélix dans tout ça ? Facile, on doit son nom à l’obélisque…
Raté !
« Obélix », quant à lui, vient de l’obèle
Comme « Astérix », le nom « Obélix » dérive d’un autre signe typographique : l’obèle. Loin d’être une coïncidence, ces choix constituent un hommage à la mémoire du grand-père de Goscinny, imprimeur-typographe.
Issu du grec obelos, « broche » (à rôtir), l’obèle correspond à l’origine au signe ÷, utilisé aujourd’hui pour la division. Puis il a pris la forme d’une croix latine, simple † ou double ‡, pour marquer les passages modifiés ou ajoutés dans les manuscrits anciens.
Utilise-t-on encore l’obèle ? Oui, après le nom d’une personne ou d’une date pour signaler un décès. Mais aussi comme appel de note, en complément de l’astérisque. À l’image du « couple » formé par Astérix et Obélix, l’astérisque et l’obèle sont intimement liés !
À tous les « déçus » qui étaient convaincus qu’Obélix découlait d’obélisque (obéliskos en grec), il est évident que l’imposant monument égyptien n’est pas sans rappeler la carrure du Gaulois aux nattes rousses, tout aussi impressionnante (non, je n’ai pas dit gros !).
En conclusion, rappelons que l’astérisque et l’obélisque, sont, à l’image de nos deux irréductibles, de genre masculin.
Sandrine Campese
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Merci pour ces explications, j’aime beaucoup ce rapprochement multiplication et division. Une question cependant : les « ix » des noms gaulois ont toujours un sens dans la BD (« IdefIX » -> « idée fIXE », etc). Dans e cas d »Obélix et Obèle, je ne comprends pas l’ajout du IX. Avez vous une idée ?
Merci.
Bonjour Jean-Marc, comme indiqué dans l’article, si « Obélix » vient de l’obèle, il n’en demeure pas moins que son nom évoque l’obélisque, d’où l’ajout du « -ix » à la fin, sur le modèle de « astérisque / Astérix ». Bonne journée.
« À l’image du « couple » formé par Astérix et Obélix, l’astérisque et l’obèle sont intimement liés ! »
Oui, « * » et « ÷ » sont intimement liés, mais l’on peut aussi tout simplement dire :
Comme la multiplication et la division.
Tout à fait, Armène :-).
D’où l’humour au troisième degré de nourrir Obélix avec des sangliers « embrochés » (en plus de lui faire porter un menhir…)
À noter la norme typographique pour l’emploi de l’obèle :
— Pour une personne décédée : †Kurt Cobain
— Pour une date de décès : Kurt Cobain (†1994)
Excellent le coup des sangliers embrochés ! Merci Chambaron 🙂