Les bienfaits de la lecture à haute voix en classe

L’écrivain Daniel Pennac – qui fut par ailleurs professeur de français – vante dans plusieurs de ses romans les bienfaits de la lecture à haute voix. Ainsi, dans Chagrin d’école et dans Comme un roman, il revient sur cette pratique. À plusieurs reprises, il affirme que cela intéresse beaucoup les élèves. Au passage, il évoque avec affection la détresse de l’un d’entre eux, qui s’endort et rate la fin d’un chapitre. Dans les « droits du lecteur » qu’il définit dans Comme un roman, l’écrivain cite celui de lire à haute voix.

Mais qu’en est-il de cette méthode dès lors que l’on sort de la vie, des romans et de la vertigineuse imagination de Daniel Pennac ? Il semblerait qu’elle présente un certain nombre d’avantages dans le cadre de l’enseignement. Nous avons tenté d’y voir plus clair sur ce sujet et nous vous livrons ci-dessous quelques conclusions.

Sommaire

Une meilleure mémorisation des mots…

Selon le psychologue canadien Colin MacLeod – dont les travaux sont mentionnés par Slate – on retient mieux un texte quand on le lit à haute voix. Cela est valable pour les enfants, mais également pour les adultes.

MacLeod insiste par ailleurs sur le fait que la rétention d’information semble durable, ou en tous cas non limitée aux instants qui suivent la lecture. De surcroît, le bénéfice concerne à la fois le lecteur et ceux qui l’écoutent. Dès lors, il peut être intéressant de faire lire à haute voix aux élèves des textes de fiction, mais aussi des points de grammaire, des consignes d’exercice, etc.

… mais également une meilleure compréhension

Cela ne tombe pas forcément sous le sens, mais il semblerait que lire à haute voix permette d’améliorer aussi la compréhension d’un texte. C’est la conclusion d’une étude menée en Angleterre (Reading Aloud in Britain Today). Attention cependant : d’autres chercheurs mettent en avant le fait que pratiquer la lecture à haute voix nécessite une compréhension préalable.

Erika Godde, ingénieure en expérimentation en éducation, insiste malgré tout sur la nécessité d’oraliser les écrits, notamment l’apprentissage de la lecture. Dans un article paru dans The Conversation, elle indique : « Les enfants ont encore besoin de s’appuyer sur les indices mélodiques de la voix pour comprendre la structure du langage quand ils apprennent à lire et qu’on leur demande alors de produire du langage à partir de cette structure grammaticale. Un exercice compliqué ! Il est donc indispensable que l’apprentissage de la lecture passe par l’oralisation du texte. »

Erika Godde insiste sur le fait que cela peut être bénéfique à tout âge : ainsi, le phrasé aide un bébé à apprendre à parler. L’élève de CM1 ou CM2 peut apprendre à ajouter de l’expressivité à la lecture. Quant à l’adulte, il peut avoir tendance à « reprendre le texte mal compris en lisant à haute voix » pour mieux en saisir le sens. La lecture à haute voix peut donc améliorer aussi la compréhension de l’écrit. Il n’est donc pas inutile, loin de là, de faire lire à ses élèves différents textes (fiction, poésie…).

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Une meilleure prononciation et l’acquisition de vocabulaire

Cela va presque sans dire, mais disons-le tout de même : qui lit à haute voix améliore sa prononciation ! C’est en tout cas ce qui est affirmé sur le site orthophonie.fr : « Cela permet de prononcer le mot correctement, même s’il est nouveau et que le cerveau n’a pas encore eu le temps de le faire figurer dans un processus de reconnaissance globale. »

Le même article précise par ailleurs la chose suivante : « S’entraîner quotidiennement à la lecture à voix haute a des bénéfices, dus au fait que les processus cognitifs sont mobilisés de façon régulière. Le langage oral est donc stimulé côté articulation, intonation et lexique. » En d’autres termes, le langage oral s’en trouve développé. Dans ce cadre, il paraît intéressant de proposer à ses élèves des textes qui permettent de travailler à la fois la prononciation et l’acquisition d’un vocabulaire nouveau.

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Davantage de confiance en soi et une meilleure perception de la lecture ?

Tout est affaire de méthode, mais si l’on s’y prend bien, il est très probable que la lecture à haute voix favorise la confiance en soi et l’affection pour les livres. Si aucune étude ne semble corroborer ces hypothèses, il faut noter néanmoins que cet exercice implique généralement la présence d’un public. Si celui-ci est bienveillant, il y a fort à parier que le lecteur se sentira de plus en plus à l’aise. Une enfant ayant participé au premier tour des Petits Champions de la Lecture en 2019 livrait ainsi ce témoignage : « J’aime lire à voix haute car cela me permet de mieux comprendre le texte et de vaincre ma timidité. J’aime être dans la peau des personnages et faire découvrir l’histoire à mes camarades. »

Pour ce qui est du second point, référons-nous encore une fois à Daniel Pennac. Sur France Culture, il affirmait en 2018 : « J’ai utilisé la lecture à haute voix pour faire aimer la lecture silencieuse et solitaire. » Reste à sélectionner avec soin les textes qui permettront aux élèves de prendre confiance en eux et leur donneront envie de continuer la lecture seuls.

Accéder aux nuances de l’écrit

Selon certains enseignants, lire à haute voix permettrait aux élèves de mieux saisir les subtilités d’un texte. Ainsi, sur le site La Classe, il est précisé : « L’élève qui lit s’entraîne à mieux comprendre le texte, mais le fait de le lire aux autres en s’appliquant lui permet aussi d’accéder aux nuances de l’écrit qu’il n’avait peut-être pas saisies. » C’est normal : lire à haute voix, c’est marquer des silences, les questions, les exclamations… C’est faire, finalement, un peu de théâtre. Faire lire un même texte à plusieurs élèves permettra d’ailleurs à toute la classe de se rendre compte que l’on peut le comprendre différemment. En d’autres termes : « Lire n’est plus un simple exercice, mais c’est une histoire que l’on interprète et que l’on partage. »

Faire un premier pas vers la prise de parole en public

On le soulignait plus haut : la lecture à haute voix permet de prendre davantage confiance en soi. En pratiquant l’exercice, on apprend peu à peu à poser sa voix, jouer avec les silences, gérer ses émotions et son stress… Il s’agit en quelque sorte d’un premier pas vers la prise de parole en public. Cela est évidemment très bénéfique à long terme et tout au long du cursus scolaire et de la vie professionnelle.

Attention à la mise en place

On conclura en constatant que la lecture à haute voix représente un exercice intéressant à bien des égards. Il faut toutefois prendre garde à la manière dont on le met en place. En effet, certains élèves timides peuvent se sentir très mal à l’aise dans cette situation. Un enfant qui lit mal – ou estime lire mal – peut vivre l’expérience comme une humiliation. On doit donc garder en tête le fait que cet exercice ne s’improvise pas. À cet égard, il peut être utile de prendre connaissance du travail de ce professeur, mené avec une classe de cinquième, qui a permis de construire un véritable projet commun autour de la lecture à haute voix.

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